Wednesday 21 October 2015

Translated poems 2

A second batch of poems translated into French by Leila Forissier.

Quelconque

Où les vieux messieurs achètent-ils leurs vestes beiges?
J'ai cherché dans les boutiques, mais personne en vogue
n'en vend. Il doit y avoir une chaîne,
un négociant sur catalogue, spécialisé dans le beige.
Il y a une variante - taupe - la couleur
de la soupe aux champignons, mais c'est quand même beigeâtre,
une non-couleur, la nuance de l'ennui,
du 'j'ai trop la flemme pour être coloré'.

Le beige ferait camouflage
dans un désert morne, disons le Gobi
en octobre, lorsque le vent des steppes
balaie de sable beige les plaines infinies.

Caracolant parmi les rares herbes grège
de petits rongeurs beiges creusent, élevant leurs petits
tapis sous terre attendant d'être beiges
pour se fondre dans le paysage désolé.

Le beige doit bien avoir une vertu salvatrice,
un trait qui m'a échappé; un fait beige
qui en justifie la fade existence.
Je cherche encore des arcs-en-ciel beiges.



 Published as Nondescript in Sushi & Chips (2006)


Tr Leila Forrisier



 Sept Lunes

La première lune est tout juste décroissante,
et pâle, haut dans le ciel bleu-jour.

La deuxième est le tranchant d’une épée,
à minuit, Auvergne, découpant
le velours jonché d’étoiles.

La troisième porte un halo,
présage de neige.

La quatrième lune est un rond de beurre
dans une chaude nuit de moisson, étouffée de désir.

La cinquième lune, éclipsée par la terre,  
est d’un rouge boueux, augurée de prophéties.

La sixième est occultée à maintes reprises
par des nuages vacillants.

La septième lune est celle
que l’on ne doit pas nommer.


 Published as Seven Moons in Sushi & Chips (2006)
Tr Leila Forrisier



Le Crochet

C'était la pièce sous les toits
et l'été nous baignions dans la touffeur.
Étendus sur le lit, certains de ne pas dormir
jusqu’à ne plus nous soucier de trouver le sommeil.
La sueur perlait entre nos corps
et le drap au-dessous. De sexe, bien-sûr,
il n'était pas question, tout contact proscrit.

La lune montait dans le coin
du velux, blanche
tranche de tarte, s'arrondissant
en pizza d'argent. Le souvenir me vint,
comme s'il venait de m'échapper,
de la présence d'un loquet
sur le châssis de la fenêtre, que quelque part
se trouvait une perche munie d'un crochet,
crochet qui n'allait que dans ce loquet,
et rien d'autre.

Je me dressai de mon côté du lit,
l'humidité montant à nouveau
de mon dos, l'arrière de mes cuisses.
Le fourre-tout, le placard de la souillarde,
était notre cache pour les choses
dont nous ne pensions jamais avoir besoin
et elle était là. Debout
sur le lit, je levai le loquet
et laissai entrer l'air conditionné lunaire.


 Published as The Hook in The Propriety of Weeding (2012)
Tr Leila Forrisier



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